"Celui ou celle qui chante"
© Élisabeth Carecchio
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ATELIERS BERTHIER | du 17 janvier au 3 mars |
La Réunification des deux Corées une création de Joël Pommerat avec Saadia Bentaïeb, Agnès Berthon, Yannick Choirat, Philippe Frécon, Ruth Olaizola, Marie Piemontese, Anne Rotger, David Sighicelli, Maxime Tshibangu Pour cette nouvelle création à l’Odéon-Théâtre de l'Europe, élaborée comme toujours au contact du plateau et des comédiens, Pommerat a eu envie d’aborder une forme différente de ses derniers spectacles – non pas une fiction unique et englobante, mais une mosaïque de fragments scéniques indépendants. Mais le travail d’un spectacle de la Compagnie Louis Brouillard ne s’amorce-t-il pas bien en amont des représentations, quand les futurs spectateurs se mettent à rêver librement à ce qu’ils vont voir ? Après Cercles/Fictions et Ma chambre froide, une œuvre intitulée La Réunification des deux Corées suscite bien des interrogations, qui sont déjà comme un premier pas dans la fiction... > Ateliers Berthier / 17e Si Pommerat s’est déjà mis à l’oeuvre, il éprouve actuellement le besoin de ne pas encore en parler. La raison en est simple. Pour lui, toute parole sur le projet en cours risquerait de le mutiler, du seul fait qu’elle chercherait prématurément à en déterminer le caractère. À ce stade, Pommerat prend donc des notes et préfère garder le silence. Ces notes n’ont d’autre but que d’aider les idées encore mouvantes à se déposer, à sédimenter selon leur rythme propre. Dans Troubles, le livre d’entretiens qu’il a accordés à Joëlle Gayot, Pommerat a décrit cette phase de son travail. Ses réflexions laissent entrevoir pourquoi il se méfie d’un discours qui jetterait trop vite une lumière trop crue sur ce qui se cherche : « Beaucoup de choses me traversent la tête au cours de la journée. Or j’ai une faculté terrible d’ enfouissement ou de perte de mémoire. […] Les noter, c’est vraiment sauver du néant, voire du vide, certaines idées qui me paraissent essentielles pour mon travail. » L’écriture nue – ni tri, ni élaboration, ni syntaxe même – n’est d’abord pour lui qu’un élément dans le processus global de « création théâtrale », ne visant à saisir qu’une multiplicité de silhouettes, d’atmosphères, de voies à tenter. Les préciser, ce serait aussi choisir trop vite, interdire à « beaucoup de choses » de « traverser la tête ». À l’enfouissement de l’oubli, les notes répondent ainsi par un autre enfouissement : celui de quelques mots dans le silence d’une écriture en gestation. C’est ce silence qu’il importe de préserver. C’est en lui que Pommerat laisse mûrir ce qu’il appelle plus loin « mes intuitions, mes sensations, mes désirs », et qu’il ne sépare pas des voix, des corps et des espaces. Les mots pour en parler les rejoindront le moment venu. Site de l'Odéon-Théâtre de l'Europe |