Roméo et Juliette à La Comédie-Française

Roméo et Juliette de Shakespeare à La Comédie-Française dans une mise en scène d'Eric Ruf : irai le 31 janvier, essaierai de programmer pour avril, Joyeux Noël à tous !

« Il y a un soleil noir dans cette pièce, c’est cela qu’il faut travailler », Eric Ruf

Compte-rendu de la rencontre avec Eric Ruf et Jean-François Sivadier au Théâtre du Vieux-Colombier : à suivre...

« À l’opposé de la fade légende qui l’entoure, la pièce de Shakespeare nous suggère une dimension cachée de l’âme humaine : l’idéologie de la virilité meurtrit les femmes, perd les hommes et dresse des tombeaux là où devraient s’ouvrir les lits du vrai bonheur. » Marc-Henri Arfeux



Roméo et Juliette est sans doute l’oeuvre la plus connue de Shakespeare et pourtant… là où la représentation communément partagée voit l’incarnation de l’histoire d’amour absolue, symbolisée par la célèbre scène du balcon, se cachent nombre de ressorts bien plus complexes, au point que la romance ne semble y être qu’une anecdote. « Il y a un soleil noir dans cette pièce, c’est cela qu’il faut travailler », déclare Éric Ruf qui en assure la mise en scène et la scénographie. Car cette tragédie qui recèle quelques savoureux moments de comédie est une pièce fantôme qui n’a pas été aussi souvent montée qu’on pourrait le penser. Entrée au répertoire de la Comédie-Française en 1920, elle n’a pas été donnée Salle Richelieu depuis 1952. Essorée par de multiples adaptations à l’opéra, au cinéma, cantonnée dans sa réputation de drame romantique, elle est pourtant faite de vengeances, de déliquescence politique et de haines familiales paroxysmiques. Le contraste est brutal entre la naïveté d’adolescents éperdus et la violence programmée des Montaigu et des Capulet qui ensanglantent Vérone, mus par une rancoeur ancestrale dont le sens même leur échappe. « À l’opposé de la fade légende qui l’entoure, la pièce de Shakespeare nous suggère une dimension cachée de l’âme humaine : l’idéologie de la virilité meurtrit les femmes, perd les hommes et dresse des tombeaux là où devraient s’ouvrir les lits du vrai bonheur. » (Marc-Henri Arfeux)
www.comedie-francaise.fr/spectacle-comedie-francaise
Roméo et Juliette de Shakespeare à La Comédie française dans une mise en scène d'Eric Ruf : irai le 31 janvier, essaierai de le programmer en avril, Joyeux Noël à tous !

« Il y a un soleil noir dans cette pièce, c’est cela qu’il faut travailler », Eric Ruf

Compte-rendu de la rencontre avec Eric Ruf et Jean-François Sivadier au Théâtre du Vieux-Colombier : à suivre...

« À l’opposé de la fade légende qui l’entoure, la pièce de Shakespeare nous suggère une dimension cachée de l’âme humaine : l’idéologie de la virilité meurtrit les femmes, perd les hommes et dresse des tombeaux là où devraient s’ouvrir les lits du vrai bonheur. » Marc-Henri Arfeux


Roméo et Juliette est sans doute l’oeuvre la plus connue de Shakespeare et pourtant… là où la représentation communément partagée voit l’incarnation de l’histoire d’amour absolue, symbolisée par la célèbre scène du balcon, se cachent nombre de ressorts bien plus complexes, au point que la romance ne semble y être qu’une anecdote. « Il y a un soleil noir dans cette pièce, c’est cela qu’il faut travailler », déclare Éric Ruf qui en assure la mise en scène et la scénographie. Car cette tragédie qui recèle quelques savoureux moments de comédie est une pièce fantôme qui n’a pas été aussi souvent montée qu’on pourrait le penser. Entrée au répertoire de la Comédie-Française en 1920, elle n’a pas été donnée Salle Richelieu depuis 1952. Essorée par de multiples adaptations à l’opéra, au cinéma, cantonnée dans sa réputation de drame romantique, elle est pourtant faite de vengeances, de déliquescence politique et de haines familiales paroxysmiques. Le contraste est brutal entre la naïveté d’adolescents éperdus et la violence programmée des Montaigu et des Capulet qui ensanglantent Vérone, mus par une rancoeur ancestrale dont le sens même leur échappe. « À l’opposé de la fade légende qui l’entoure, la pièce de Shakespeare nous suggère une dimension cachée de l’âme humaine : l’idéologie de la virilité meurtrit les femmes, perd les hommes et dresse des tombeaux là où devraient s’ouvrir les lits du vrai bonheur. » (Marc-Henri Arfeux)
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Les mesures de sécurité qui étaient en cours cette semaine sont prolongées jusqu’au 6 décembre.

Donc aucune sortie/voyage jusqu’à cette date, je suis désolée.

L'Orestie de Romeo Castallucci à l'Odéon-Théâtre de l'Europe : rendez-vous à 19h30 jeudi 3 décembre


Rendez-vous à 19h30

Durée : 2h30 avec un entracte

Rencontre avec Romeo Castellucci : samedi 5 décembre à 14h30
"Le seul universel qui m'intéresse est celui que je ne parviens pas à décrire et qui ne se laisse pas décrire par des mots. […] Je travaille sur ma mémoire pour la faire ensuite exploser dans les choses et dans la matière, laquelle, comme on sait, est parfaitement indifférente à l'homme. Je crois toutefois que la beauté ne peut se dégager que de la rencontre, sur un terrain commun, de l'humain et de l'inhumain. Au fond, c'est exactement cela que la tragédie semble nous dire. Nous éloigner de l'humain pour que nous puissions nous apercevoir de sa fragile existence qui nous interroge.
Romeo Castellucci
(Itinera. Trajectoires de la forme, Tragedia Endogonidia. Actes Sud, 2008)

Rencontre avec Romeo Castellucci Scènes Imaginaires
Odéon - Théâtre de l'Europe
Samedi 5 décembre - 14h30
De quoi est fait l’imaginaire des hommes de théâtre ?
Animé par Arnaud Laporte
Producteur de l’émission
la Dispute sur France Culture
Un portrait de Romeo Castellucci, dessiné sur le vif, à travers un long entretien entrecoupé de lectures de textes de toute nature choisis par l‘artiste et lus par des comédiens qui lui sont chers.


Joël Pommerat à "La Grande Table" mercredi 11 novembre à 12 heures sur France-Culture

www.franceculture.fr/emission-la-grande-table-1ere-partie-joel-pommera...Il y a 23 heures - Emission La Grande Table (1ère partie). du lundi au ... Joël Pommerat, auteur dramatique, metteur en scène français ... Ca ira (1) Fin de Louis.

La Dispute sur France-Culture (9 novembre) : Ca ira (1) Fin de Louis de Joël Pommerat




Ça ira (1) Fin de Louis s’intéresse au processus révolutionnaire plutôt qu’aux héros, observe les mécanismes qui régissent l’action des individus, insiste sur la dimension collective de l’action politique. Les révolutionnaires étaient‑ils préparés à l’exercice du pouvoir ? Quelle fut la réalité de leur apprentissage, de leurs enthousiasmes et de leurs controverses ? La Révolution française est le fondement de nos démocraties modernes, la base des idées et valeurs qui les constituent.

« Le public de Mons sait désormais que le théâtre n'est jamais achevé, que sa fragilité même est sa force. » Daniel Cordoba

Ca ira (1) Fin de Louis, Joël Pommerat


 Création du spectacle au Théâtre de Nanterre les Amandiers le 4 novembre 2015

Au Théâtre du Manège, à Mons, en Belgique, le 16 septembre 2015,
20 heures : salle pleine.

Joël Pommerat :
« Bonsoir, je suis responsable de ce que vous allez voir. Au bout de trois heures — je n'en suis pas tout à fait sûr (rires) —, on fera autrement : on continuera de construire devant vous la dernière partie de cette épopée qui, d'ici à deux ou trois ans, connaîtra un nouvel épisode (Scoop ?). Quoiqu'il arrive, on s'arrête à minuit. »


« Le public de Mons sait désormais que le théâtre n'est jamais achevé, que sa fragilité même est sa force. » 

Daniel Cordoba, Directeur du Théâtre du Manège, à Mons  le 16 septembre 2015

15 Ça ira (1) Fin de Louis - youtube.com



Ca ira (1) Fin de Louis : nouvelle création de Joël Pommerat avec la Compagnie Louis Brouillard

La révolution à l'oeuvre

 Emmanuelle Bouchez (25/10/2015)
Photos : Elizabeth Carecchio

Télérama.fr - Arts et Scènes
Comment, en six mois, Joël Pommerat a révolutionné 1789


Improvisations, trac, excitation. Nous avons partagé les émotions historiques des quatorze comédiens et de leur metteur en scène au cours de sept répétitions du spectacle “Ça ira (1) Fin de Louis”.

En coulisses

 « Je veux que vous insistiez tous davantage sur la peur de mourir ou… de tuer. »


Six mois de répétitions pour écrire un spectacle avec quatorze acteurs à partir de longues séances d'improvisation... Depuis vingt-cinq ans, Joël Pommerat s'est forgé une identité d'auteur-metteur en scène. Il plonge aujourd'hui sa Compagnie Louis Brouillard dans le maelström de l'Histoire, loin de son répertoire où une collection de contes ­(Pinocchio, Cendrillon) alterne avec des défrichages poétiques du monde contemporain (la famille, le travail, le commerce, l'amour) mis en chair sur scène dans de somptueuses images.
Cette fois, il s'attaque à 1789, avouant, pince-sans-rire, avoir baptisé l'épopée du titre le plus laconique possible, Ça ira (1) Fin de Louis, pour éviter de citer la Révolution française et que notre imaginaire collectif ne s'emballe. « Le roi » et « la reine » (jamais nommée Marie-Antoinette) y sont les deux seuls personnages connus. Sieyès, Barnave, Lafayette ou Robespierre sont présents par leurs idées mais se fondent dans la masse des anonymes vêtus de costumes inspirés des années 70. Necker s'appelle Müller... Et, à la différence d'Ariane Mnouchkine, dont 1789 contait la Révolution du point de vue du peuple en 1971, Pommerat campe dans le détail toutes les tensions politiques.
Lien pour lire la suite : Télérama.fr - Arts et Scènes 

 
En mai, plongée dans la révolution roumaine de 1989

Je cherche l'état sensible des protagonistes de 1789”
Il a tout potassé ! Michelet, les marxistes, les chercheurs américains comme Timothy Tackett, spécialiste des Etats généraux. Et surtout les derniers travaux de la Française ­Sophie Wahnich, qui a réhabilité la place de l'émotion dans l'Histoire. Grâce à elle, il a trouvé le moyen de transcender le critère de l'exactitude : « Je cherche l'état sensible des protagonistes de 1789. Cela m'affranchit. Je ne vise pas la reconstitution (quel ennui !), je crée une autre "temporalité" : ni celle du XVIIIe ni celle de 2015, plutôt un espace-temps imaginaire où se croisent les faits et les ressentis. Tout le travail de recherche avec les acteurs s'appuie sur ça. »
Joël Pommerat ne va pas raconter toute la Révolution, même si le chiffre 1 du titre augure d'une suite. S'il reste mystérieux sur la date précise du dernier tableau, il évoque vingt-quatre scènes pour décrire une petite année (1789-1790) où le temps de l'histoire s'accélère... Pour partager leur méthode, Joël Pommerat et ses acteurs nous ont ouvert les portes de leur atelier, du mois de mai dernier à la « première », le 16 septembre en Belgique, dans le cadre de Mons Capitale européenne de la culture...


En juin, le roi reçoit les Parisiennes des Halles.

6 mai 2015. Ferme du Buisson, Marne-la-Vallée, 49e jour de répétition.
Climat : grand vent dehors, tempête dedans.

Début d'après-midi. Les comédiens discutent sous les marronniers agités par la bise de la Ferme du Buisson, où ils travaillent trois semaines. « Voilà Joël ! » Tous se glissent dans la halle, munis de carnets ou de tablettes pour les nouvelles consignes. « On est fin juin 1789. Louis a renvoyé Necker/Müller, qui était très populaire, et nommé à sa place un réac. Paris est encerclé par trente mille soldats. Cela ne sent pas bon. Malgré tout, les députés planchent sur la Constitution. Un comité de quartier parisien se réunit. Que faire ? » La veille, le metteur en scène leur a proposé de prendre position sur la lutte armée. « C'est excitant mais on se jette à l'eau la boule au ventre. Car on vit une course de relais, chacun doit être à la hauteur », commente Philippe Frécon, qui, comme la plupart des garçons, a rejoint l'équipe Pommerat en 2013, pour La Réunification des deux Corées.
“Je veux que vous insistiez tous davantage sur la peur de mourir ou... de tuer.”
Pommerat le reprend avec diplomatie : « Ton intervention, Yannick, n'est pas fausse du tout, mais reste le ton de coq. Je veux que vous insistiez tous davantage sur la peur de mourir ou... de tuer. Aucun de nous n'en serait sans doute capable, mais il faut fouiller de ce côté-là. On ne pourra jamais comprendre la psychologie de l'époque mais si vous-mêmes vous vous déplacez vers elle, vous découvrirez son versant sensible. »

7 mai 2015. Ferme du Buisson, 50e jour de répétition.
Climat : hypnotisés par la vidéo.

Changement de plan. Marion Boudier, la dramaturge, qui a beaucoup alimenté la troupe en images de la place Maidan, à Kiev, propose des documents filmés de la révolution roumaine en 1989. Ils révèlent la confusion au « château » des Ceausescu, la guérilla... Une heure de projection sans commentaires, exceptés ceux de Bogdan Zamfir, jeune acteur d'origine roumaine formé à l'école de théâtre de Liège comme les deux autres nouvelles recrues, Yvain Juillard et Simon Verjans. Fin du film. Les acteurs s'ébrouent, un peu sidérés par ces images brutes, comme l'envers d'un décor. A 16 heures, ils enfilent les panoplies de la veille imaginées par Isabelle Deffin, créatrice « de vêtements plutôt que de costumes ». Ruth Olaizola, pilier de la compagnie, se demande à la fin de la journée « s'ils ont bien tout donné ».


25 juin 2015. Théâtre des Amandiers, Nanterre 76e jour de répétition.Climat : questions en vrac.

La compagnie vient de « poser ses valises » aux Amandiers pour l'été. Eparpillés dans les rangées de la grande salle (où le spectacle commence début novembre), les comédiens sont difficiles à reconnaître. Ils ont encore changé de perruques ! Ils sont les représentants du tiers état, surtout provinciaux et tout juste débarqués à Versailles, en mai 1789. Reprise de la scène 6 (un débat houleux entre les députés du tiers). L'auteur l'a déjà écrite mais redemande à ses acteurs « une synthèse » sur le vif. Il compte sur eux pour rassembler, dans le feu du jeu, les motivations complexes des personnages. Certains posent beaucoup de questions, notamment sur la nécessité d'improviser encore sur cette scène. Pommerat tient bon : « Si je m'y mets tout seul, je vais en rajouter ! »
Après la pause... passage direct à la 18, l'un des plus célèbres épisodes de la Révolution : l'entrevue des Parisiennes des Halles avec Louis XVI, à Versailles, pendant les journées d'octobre 1789. Le décor, imaginé par le scénographe Eric Soyer et Joël Pommerat, produit son effet : de grandes ­parois ardoise s'ouvrent sur la silhouette de Louis (Yvain Juillard), dont on imagine qu'il surgit des dédales du palais. Le quatuor des actrices phares de la compagnie l'attend pour une première impro. Agnès Berthon, Anne Rotger, Saadia Bentaïeb, Ruth Olaizola se plaignent de la famine, expriment la perte de confiance du peuple en son roi. Une variété de voix : entre déférence de celle qui s'évanouit (après avoir raté son selfie, drôlissime séquence !) et distance sèche de la plus politique.
“La situation est plus tendue : il y a dix mille personnes dehors !” 
Du théâtre déjà convaincant conduit d'un trait. Mais l'historien-conseil Guillaume Mazeau, chercheur à Paris-I, veille : « les comédiens révèlent parfois de l'inattendu, telle cette audace politique de Louis XVI dans son premier discours aux Etats généraux, que je n'avais jamais perçue à ce point... mais là je dois cadrer. La situation est plus tendue : il y a dix mille personnes dehors ! Ces déléguées ont obtenu des choses concrètes qu'on n'entend pas : la baisse des prix, la sécurisation des convois, la signature par le roi de la Déclaration des droits de l'homme... » Dans la foulée, Mazeau retourne préparer les « pochettes » pour les acteurs. Menu copieux garni d'archives... qu'ils digèrent chaque soir. Ils se souviennent encore des vingt-cinq pages de discours de Mirabeau à avaler avant les impros du lendemain, lors des premiers ateliers..

Le tiers état s'enflamme

22 juillet 2015. Théâtre des Amandiers, Nanterre 85e jour de répétition.
Climat : inquiétude et petite fatigue.

Début d'après-midi. Pommerat a rallongé sa session d'écriture matinale mais les acteurs Maxime Tschibangu et Eric Feldmann sont déjà là. Depuis le 15 juillet, ils sont arrimés « à la table » pour lire à voix haute les dix-huit scènes à peu près établies. Sur les vingt-quatre prévues, il en reste encore trois, « pas du tout abordées en impro ». Le temps file... Alors que l'équipe technique s'installe sur scène, tous rejoignent « l'Aquarium », au sous-sol. L'auteur arrive, la fatigue souriante. Même les mouches n'osent pas voler. Il est 16h10. Encore la scène 6, cette héroïque joute de discours au tiers état entre députés du tiers plutôt « monarchiens » et ceux désignés plus tard comme « les enragés ».
“C'est la rage, la colère qui vont te donner confiance et force.”
Y participe Madame Lefranc, personnage de radicale en partie inspirée de Robespierre, Marat ou Desmoulins (quatre femmes sont députées chez Pommerat, trahison historique assumée) : « Fais attention, Saadia, dit-il avec bienveillance, ces argumentations ne sont pas articulées comme dans la langue courante. C'est la rage, la colère qui vont te donner confiance et force. » A chaque page, il y a des italiques, un système de coupes ou de variantes que l'acteur prend ou laisse. Pommerat s'abstrait, l'oreille concentrée. Certaines tournures pèsent. Les termes d'« Assemblée nationale » reviennent trop. On peut passer quinze minutes à trancher et Pommerat en rit. « En impro, il refusait "tiers état", car c'était connoté "passé", commente le comédien Yannick Choirat. Il a fallu avancer dans les scènes pour que ce mot-là n'appartienne plus à l'Histoire mais à nous, aux personnages, au spectacle. Grâce à Joël, je prends la mesure de mes actes sur scène. Je ne serai jamais plus le même acteur. »
“On vise un double mouvement, celui de l'Histoire sous celui du texte.”
Désormais, chacun connaît son parcours. Choirat s'impose en Necker façon jeune Chirac. Agnès Berthon passe d'extrémiste de gauche à ultra, d'une perruque bouclée à un chignon lissé : « Rien à voir avec les personnages habituels de son théâtre, chuchotant et surgissant comme par magie. Ici, c'est le verbe, puissant, qui les construit ! » Et Saadia Bentaïeb poursuit : « Dans les créations passées, le rythme était scandé par l'impro, la lecture à la table, et le retour sur scène pour les corrections. On n'a jamais poussé aussi loin la méthode car on vise un double mouvement, celui de l'Histoire sous celui du texte. »

3 septembre 2015 . Théâtre des Amandiers, 121e jour de répétition.Climat : ça urge !

Ils ont pris leurs aises aux Amandiers. Le capitaine-auteur a fini d'écrire vingt et une scènes et l'on n'entendra plus parler des trois dernières. A treize jours de la première à Mons, les acteurs verrouillent dans leur mémoire le premier bloc. Depuis deux semaines, ils ont l'impression d'aborder enfin l'interprétation... quoiqu'elle se soit construite naturellement pendant la recherche. « Joël voit tout, tout le temps », ­explique Agnès. « Ses indications sont si puissantes, dit Gérard Potier, qu'elles nous portent plusieurs jours. » Le dernier bloc (les scènes 17 à 21) doit être chronométré aujourd'hui. Il est 15 heures. On vérifie les enchaînements pour mieux filer l'ensemble le soir. Les techniciens sont en embuscade. A la fin du filage, à 23 heures, la durée tombe telle la guillotine : 1h38. « La moitié en trop », tranche Pommerat. Voilà sa manière : écrire toutes les nuances possibles puis les condenser jusqu'au suc. Il promet la nouvelle version pour demain. « Ce serait bien qu'on ait les textes définitifs le plus vite possible », murmure Ruth. Les anciennes font doucement pression...

11 septembre 2015. Théâtre des Amandiers, Nanterre, 128e jour de répétition.
Climat : ambiance de dernière fois.

En juin, Louis (Yvain Juillard) s’avance vers son peuple… de spectateurs.

14h30. Les coulisses sont vides. En attendant le retour ­officiel de la troupe, fin octobre, le théâtre lui a laissé l'Aquarium, où répéter quatre jours de plus. « J'ai hâte de jouer, mais je sais qu'on ne sera plus jamais en création », avoue Bogdan, nostalgique. Lucia souriait, confiante, à la pause déjeuner : « Ça ira (1) est déjà au-delà de ce que j'imaginais avec tous ces acteurs époustouflants ! Que ce soit long et difficile est normal, car le texte est vivant, né d'improvisations. Il va d'ailleurs encore bouger pendant la tournée. »
“J'ai cessé d'être comédien pour voir des personnes sur scène et non des rôles.”
Mais d'ici là... pain sur la planche ! Face à tous, calme (toujours), Pommerat explique qu'il vient de parler au directeur du Théâtre du Manège, à Mons : « Daniel Cordoba a senti qu'on était en retard. Il ne souhaite pas que cela nous terrorise et propose de donner à voir un spectacle encore au travail, que je puisse interrompre. On doit accepter. » Stupeur, puis passionnant débat. Tous remontent à la source de leur expérience dans la compagnie. Lui aussi regarde en arrière : « J'ai cessé d'être comédien pour voir des personnes sur scène et non des rôles. Je n'ai pas peur de casser le cadre attendu par les spectateurs. » Agnès résume : « Dans la mesure où tu nous exposes déjà beaucoup au milieu du public, pourquoi pas ? »

16 septembre 2015. Théâtre du Manège, Mons, Belgique.
Climat : le grand bain.

20 heures : salle pleine. Pommerat tourne en rond près de la régie. Et se lance : « Bonsoir, je suis responsable de ce que vous allez voir. Au bout de trois heures — je n'en suis pas tout à fait sûr (rires) —, on fera autrement : on continuera de construire devant vous la dernière partie de cette épopée qui, d'ici à deux ou trois ans, connaîtra un nouvel épisode (Scoop ?). Quoiqu'il arrive, on s'arrête à minuit. »
“On se croirait dans une AG de 68... J'ai déjà donné !”
Les scènes s'enchaînent. Le public se concentre sur les discours, opine ou pas. Quand le président du tiers état appelle au vote « assis/debout », il frémit. A l'entracte, une poignée râle du trop-plein de cris et de paroles (Madame Lefranc, alias Saadia, s'est battue comme une lionne face aux attaques) : « On se croirait dans une AG de 68... J'ai déjà donné ! » A cette évocation, Guillaume Mazeau, l'historien, est ravi : « Nous qui avons l'habitude d'une vie politique lisse, ça nous provoque ! Le glacis du patrimoine a recouvert 1789 : on en avait oublié la "conflictualité", le climat d'opposition et d'extrême pugilat. »
“Le théâtre n'est jamais achevé, sa fragilité même est sa force.” 
A 23h40, les acteurs, courageux, s'y remettent. Pommerat re-toque les déplacements. Tous s'exécutent. Une demi-heure plus tard, rideau. La démonstration est terminée. Ouf ! Le salut officiel, les acteurs l'ont déjà fait tout à l'heure, avec un large sourire. Au pot de première, Daniel Cordoba est heureux : « Le public de Mons sait désormais que le théâtre n'est jamais achevé, que sa fragilité même est sa force. » Joël Pommerat, yeux rieurs, discute avec ses acteurs-auteurs tout à coup décontractés. Quand on le croise le lendemain, il a déjà repris sa course de fond : « Je reste concentré sur tout ce qu'il faudrait faire autrement. »

1963
Naissance de Joël Pommerat à Roanne.
1982 Monte à Paris pour devenir comédien.
1990 Crée la Compagnie Louis Brouillard.
1995 Pôles, premier texte abouti à ses yeux.
2004 Au monde, au Théâtre national de Strasbourg.
2006 Au monde, Les Marchands, au Festival d'Avignon.
2010 Cercle/Fictions, artiste associé au Théâtre national de l'Odéon.
2013 La Réunification des deux Corées.
2014 Artiste associé à Nanterre-Amandiers.

A voir
 
Ça ira (1) Fin de Louis au Théâtre Nanterre-Amandiers, du 4 au 29 nov. (92), tél. : 01 46 14 70 00 ; les 3 et 4 déc. à L'Apostrophe, Cergy-Pontoise, tél. : 01 34 20 14 14 ; les 10 et 11 déc. au Havre, tél. : 02 35 19 10 10 ; du 8 au 28 janvier à Villeurbanne, tél. : 04 78 03 30 30, puis à Chambéry, Annecy...

A lire
Par la volonté du peuple, de Timothy Tackett, éd. Albin Michel, 372 p., 22,40 €.
La Révolution française. Un événement de la raison sensible, de Sophie Wahnich, éd. Hachette, 304 p., 28,50 €.

Catherine Fourty, seule en scène dans REVENIR !



Un texte quasi-autobiographique de Barbara Bouley sur l'histoire de son père, atteint du Post Traumatic Stress Disorder PTSD à son retour de la guerre d'Algérie.



12/11/2015 - 13/11/201514 h 30 min - 20 h 00 min (durée : un peu plus d'une heure)
Théâtre ANIS GRAS, Le lieu de l'autre
55, avenue Laplace – 94110 Arcueil
* lieu très facile d'accès depuis Porte d'Orléans en 187 ou en RER B. La station est à 3 minutes à pieds !

Mini série sur le PTSD – Quand parlent les cendres
Jeudi 12 novembre à 14h30 et 20h, Vendredi 13 novembre à 14h30 et 20h.




REVENIR ! Mini série sur le PTSD est le spectacle-mémoire d’un programme de recherches sur les blessures invisibles de la guerre que la cie Un Excursus mène depuis mars 2013. Connues depuis la nuit des temps, les blessures morales et psychologiques liées à la guerre ont été désignées de bien des façons: obusite, hystérie des tranchées, syndrome du vent des boulets…
Dans le vocable médical on les regroupe sous le sigle de PTSD (Post Traumatic Stress Disorder).Le spectacle est composé de trois « épisodes » distincts. Dans le premier, qui a pour sous titre « Quand parlent les cendres » la fille d’un ancien appelé du contingent se remémore son enfance et témoigne, avec pudeur et tendresse, du traumatisme de son père, revenu de la guerre d’Algérie, l’âme blessée.


Catherine Fourty : "La Fille"





Texte & Mise en scène / Barbara Bouley, Scénographie / Barbara Bouley & Eric Fassa, Lumières / Eric Fassa, Son / Nadège Milcic, Montage vidéo / Marie Tavernier, Avec : Sarah Chaumette, & Les voix de Daniel Buisson & de Karim Ikeni


La Réunification des deux Corées de Joël Pommerat à McGill par la troupe universitaire Franc-Jeu




Clarisse, Léa, Max et Victor de l'Option Théâtre de 1ères et de Tles 2011-2013 ont créé une troupe universitaire à McGill au Québec, "Franc-Jeu".
Ils connaissent un véritable triomphe dans La Réunification des deux Corées de Joël Pommerat dont ils ont découvert la création aux Ateliers Berthier en 2013 dans le cadre du Partenariat avec l'Odéon-Théâtre de l'Europe.
Les élèves de l'Option Théâtre ont eu la chance de rencontrer Joël Pommerat à l'issue de la représentation de Cendrillon l'année précédente, et à nouveau en 2013 à la fin de la La Réunification des deux Corées.
Un grand bravo à tous ! 


 

 


La Réunification des deux Corées de Joël Pommerat
En une mosaïque de vingt instants singuliers, La Réunification des deux Corées explore la complexité des liens amoureux. Amants, amis, couples mariés ou adultères, vieilles histoires et relations passagères esquissent un tableau réaliste de ce qui nous attache et nous déchire en même temps. Réel ou ressenti, il n'y a pas d'amour, il n'y a que des manques d'amour.
LA FEMME: L’amour ça ne suffit pas.
L’HOMME: Répète s’il te plaît.
LA FEMME: On s’aime mais ça ne suffit pas.
L’HOMME: On s’aime mais ça ne suffit pas ?
LA FEMME: Oui.
L’HOMME: Mais c’est n’importe quoi.”


  • Laure-Diane Jardon Bravo Clarisse, Léa, Max et Victor, vous avez fait du chemin depuis 2013, très fière de vous, comme j'aimerais vous revoir sur scène, de vrais pros à présent, surtout depuis que vous acheté les droits de La Réunification à la Compagnie Louis Brouillard ! Comment vous en sortez-vous avec les auto-tamponneuses ?
  • Victor Gassmann Merci Laure-Diane!! Nous avons terminé le montage et le plan d'éclairage aujourd'hui, tout se passe très bien et la troupe est plus motivée que jamais! Demain c'est la première générale, je peaufine le rôle que j'ai toujours rêvé de jouer: l'Instituteu
    La pièce va être filmée et on t'enverra une copie bien évidemment! Merci à toi de nous avoir fait découvrir ce dramaturge et metteur en scène fabuleux, qui je pense plaira beaucoup aux étudiants de notre université.
    Pour ce qui est des auto-tamponneuses, ce sera quand la troupe partira en tournée et s'installera à l'Odéon!
Laure-Diane Jardon Tous mes voeux vous accompagnent pour ce soir, je vous embrasse tous bien fort, hâte de voir le film !!!

Le Faiseur de Balzac au Théâtre des Abbesses : mise en scène d'Emmanuel Demarcy-Motta

Le Faiseur de Balzac au Théâtre des Abbesses : mise en scène d'Emmanuel Demarcy-Mota
Rendez-vous au Théâtre des Abbesses mercredi 1er avril à 20h15
Début de la représentation : 20h30 (durée : 1h50)




Plongée dans les mœurs, coutumes et ambitions des « hommes d'affaires » aux abois, vertigineux vaudeville balzacien. Les temps changent bien peu.


JEUX DE DUPES
Quand Balzac campe de simples humains piégés par leurs rêves et par le goût du pouvoir, Emmanuel Demarcy-Mota épice le cynisme ambiant d’un humour rageur et ravageur.

Un homme d’affaires ruiné tient ses créanciers en haleine, leur promettant le rapide mariage de sa fille avec un garçon riche. Lequel, en réalité, compte sur cette
« fiancée » pour payer quelques dettes pressantes. Sans la moindre complaisance, Balzac s’est amusé à entrecroiser les tromperies, à composer un jeu de dupes, réjouissant autant qu’effrayant. Car on pourrait lire cette histoire dans le quotidien du jour, elle est de tous les temps. Il suffirait de changer les noms, de prendre les choses avec l’humour rageur et ravageur d’Emmanuel Demarcy-Mota, avec son attention quasi amicale envers les personnages. « Money, Money », chante le chœur, accompagnant sur un ton de plus en plus mélancolique les étapes de cet enlisement dans le cynisme d’un mensonge sans issue. Cynisme généralisé, assumé jusqu’à l’inconscience, jusqu’à l’innocence. Alors, avec un superbe brio, une tendresse subtile, les comédiens font vivre de simples humains, piégés par leurs rêves, par le goût et l’exercice du pouvoir. Ils croyaient y trouver le bonheur.    
Colette Godard
En observant Mercadet, spéculateur aussi cynique que sympathique, se débattre dans des situations toujours plus périlleuses, Balzac ne fait surtout pas la morale : Il s'amuse, campe des personnages aussi fortement vivants que dans ses romans, les bouscule, les secoue de répliques claquantes, leur fait subir les lois de la Comédie. Et c'est ce qui a séduit Emmanuel Demarcy-Mota : faire redécouvrir une pièce rarement jouée, découvrir un Balzac comme toujours creusant au cœur du réel, et cette fois, impitoyablement drôle.
Dossier pédagogique du Théâtre de la Ville
Dossier proposé et réalisé par le Théâtre de la Ville
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Et il n'en resta plus aucun, adaptation de Dix petits nègres d'Agatha Christie par Robert Sandoz au Théâtre de l'Ouest parisien





 Robert Sandoz est assisté à la mise en scène par Thomas Matalou


 Compagnie "L'outil de la ressemblance"


Dix personnages prisonniers, une étrange série de meurtres où chacun tente de résoudre l’énigme, dix individus potentiellement coupables du crime…

Les Dix petits nègres d’Agatha Christie sont une aubaine pour le metteur en scène Robert Sandoz qui y voit un moyen d’analyser les ressorts du mystère pour inventer une nouvelle manière de vivre une histoire policière au théâtre.

Ceux qui restent, David Lescot au Café des Œillets (Théâtre de la Ville)


 "Oui, ça va...", Les enfants du ghetto
 
 
 
Texte de Paul Felenbok & Wlodka Blit-Robertson
 




Paul Felenbok était 7 et Wlodka Blit-Robertson était 12 comme ils ont échappé à la destruction du ghetto de Varsovie en Avril 1943. Ils sont les témoins vivants de cette tragédie. David Lescot à leur rencontre et les a interviewés. Reflétant étroitement le document, David Lescot transpose en écriture théâtrale leurs témoignages.



Das Weisse vom Ei (Une île flottante de Labiche) : mise en scène de Christoph Marthale


Rendez-vous à 20h au Théâtre de l'Odéon, VIème : mercredi et jeudi 11 et 12 mars à partir de 19h30

(durée : 2h20) 


"Chez l'imprévisible Labiche revu par Marthaler n'y a pas que les horloges qui soient déréglées"...

www.theatre-odeon.eu

 

"Eh bien, et ce client ?
– Ah ! Que tu es curieuse !... C'est un cocher de la maison qui a reçu un coup de pied de cheval... Là
– Un cocher ?... Mon compliment !... Demain, on viendra te chercher pour le cheval." 

 


"Chez l'imprévisible Labiche revu par Marthall n'y a pas que les horloges qui soient déréglées"...

Il suffit d'un dialogue repris da capo comme un air d'opéra pour qu'on se retrouve de plain-pied chez Ionesco. Il suffit d'une prise électrique située un peu trop loin d'un appareil à brancher pour que le fil électrique se torde comme un serpent python échappé d'un cauchemar à la Tati.

Il suffit d'un siège qui cède sous un postérieur pour évoquer le Brecht de La Noce chez les petits-bourgeois ou les pantomimes des grands comiques du cinéma muet. Il suffit qu'un piano soit une harpe – et il l'est – pour livrer la scène à tous les carambolages de l'humour dada... Marthaler s'approprie comme nul autre tout ce qu'il touche et l'affole pour le rendre plus vrai que nature. Sous la conduite de ce diable d'artiste, l'île flottante du vaudeville largue les amarres de l'intrigue et prend gaiement le large, au vent de la plus libre fantaisie.  

Marthaler, on se l'imagine disant «Théâtre !» comme un maître de cérémonie lève la main et n'a qu'à s'écrier «Musique !» pour qu'aussitôt l'orchestre joue. Comme s'il lui suffisait d'un geste et de ce mot-là pour qu'à l'instant le théâtre soit présent, entièrement, et nous enveloppe dans une entente d'une autre sorte. «Théâtre !» et nous voilà pris, embarqués comme on peut l'être par la musique, dans un monde où rien ne veut plus rien dire et où tout fait sens. Où s'ouvre dans le temps quotidien une brèche de quelques instants où l'on accepte tout sans nul besoin de comprendre, dans un suspens aussi mystérieux qu'évident – où l'évidence et le mystère, loin de s'opposer, deviennent condition l'un de l'autre.
Ne cherchez donc pas d'île flottante dans le théâtre complet de Labiche : il n'y en a pas. Mais donner un nom de dessert à un spectacle d'après l'auteur du Prix Martin (créé à l'Odéon la saison dernière par Peter Stein), voilà une belle idée qui ressemble bien à Christoph Marthaler, magicien de théâtre et spirituel Prospero de cette île savoureuse entre toutes. Plutôt que de monter un seul texte de Labiche, le maître suisse a extrait de ses œuvres des matériaux à accommoder à sa manière inimitable. Cette fois-ci, il est parti de La Poudre aux yeux, une comédie en deux actes déjà hilarante en elle-même. On y voit s'affronter deux bonnes familles bourgeoises aux noms vaguement évocateurs de bêtes à poils ou à plumes, chacune pourvue d'un enfant en âge d'être marié. Cela tombe bien : Emmeline Malingear et Frédéric Ratinois font déjà tant de musique ensemble qu'on a commencé à jaser dans le voisinage... Il est donc urgent d'ouvrir les pourparlers matrimoniaux.
Histoire de les pimenter un peu, Marthaler s'amuse à faire négocier les pères de famille en français et en allemand. Bien entendu, aucun des deux ne maîtrise la langue de l'autre... Et comme pour ruiner définitivement toute chance de surmonter les malentendus, il leur incorpore délicatement un joli morceau d'Un Mouton à l’entresol, puis saupoudre le tout de délirantes surprises du chef. La première d'entre elles, un prologue polyphonique et polyglotte prononcé à l'avant-scène par la troupe impavide, dynamite allègrement toute chance de «comprendre» quoi que ce soit, comme pour nous préparer aux joyeuses loufoqueries du royaume de théâtre qui nous attend derrière le lourd rideau de velours. Quelques instants plus tard, sous l'œil inscrutable des vieux portraits de famille (au fait, laquelle ?...) qui ornent tous les murs, une pendule inconsolable sonne obstinément une heure qui n'en finit plus, avant que quelques vers du Jabberwocky de Lewis Carroll récités par un Graham Valentine plus pince-sans-rire que jamais achèvent de faire vibrer le diapason de la plus pure absurdité...

Six personnages en quête d'auteur de Luigi Pirandello au Théâtre de la Ville dans une mise en scène d'Emmanuel Demarcy-Mota

avec la troupe du Théâtre de la Ville





L’INFINI DU THÉÂTRE

Éternel Pirandello ! Treize ans après une première version, Emmanuel Demarcy-Mota revient, avec la famille d’acteurs qui l’entourent, aux intrigues et conflits magistralement écrits par le dramaturge italien.

De façon imprévue, les personnages arrivent, s’imposent à un metteur en scène et ses comédiens, imposent leurs intrigues et conflits qui se cognent aux problèmes de cette troupe censée leur donner une réalité. Situation absurde, quotidienne pour tout homme de théâtre. En particulier Emmanuel Demarcy-Mota, qui ne conçoit pas son métier sans une équipe, une famille d’acteurs avec lesquels il creuse les infinis mystères de la vie et de sa « représentation ». Il a abordé une première fois la pièce de Pirandello en 2001, avec bonheur puisqu’elle s’est jouée pendant deux ans. On y trouvait déjà sa connaissance, son intelligence passionnée du théâtre et de ses indicibles lois. L’expérience acquise au cours des ans lui a permis de creuser encore, d’affiner son travail, de sorte qu’il devenait nécessaire de retrouver les personnages et leurs interprètes, et avec eux, retrouver les méandres d’une situation à travers laquelle s’inscrivent toutes les questions imaginables et inimaginables posées par le fait de vivre ensemble.